-
1
Lorsque j’avais six ans j’ai vu,une
fois, une magnifique image,dans une livre sur la
forêt vierge
qui s’appelait Histoires
vécues.?a représentait un serpent boa qui avalait
un fauve.V
oilà la copie
du
dessin.
On
disait dans le livre :
《
Les
serpents boas avalent leur proie tout
entiè
re,sans la m?
e
ils ne peuvent plus bouger et ils
dorment pendant les six mois de leur
digerstion.
》
J’ai
alors
beauchoup
réfléchi
sur
les
aventures
de
la
jungle
et,à
mon
tour,j’ai
réussi,avec
un
crayon de
couleur,à
tracer mon premier
numé
ro é
tait comme
?
a :
J’ai montré mon
chef
-
d’oeure aux grandes
personnes et je leur ai demandé si mon dessin leur
faisait peur.
Elles m’ont répondu
:
《
Pourquoi un chapeau
ferait-il peur
?》
Mon
dessin
ne
repré
sentait
pas
un
repré
sentait
un
serpent
boa
qui
digé
rait
un
éléphant.J’ai
alors
dessiné
l’intérieur
du
serpent
boa,afin
que
les
grandes
personnes
puissent
ont toujours
besoin d’explications. Mon dessin numéro 2 était
comme ?a
:
Les
grandes personnes m’ont
conseillé de laisser de c?té les dessins de
serpents boas ouverts ou
fermés,et de
m’intéresser plut?t à la géographie,à
l’histoire,au calcul et à la grammaire.C’est ainsi
que j’ai abandonné,à l’?ge de six
ans,une magnifique carrière
de peintre.J’avais été découragé par
l’insuccès
de
mon
dessin
numéro
1
et
de
mon
dessin
numéro
grandes
personnes
ne
comprennent jamais rien
toujours et toujours leur donner des
explications......
J’ai donc d? choir un autre métier et
j’ai appris à
piloter des
avions.J’ai volé un peu partout dans
le
la géographie,c’est exact,m’a beaucoup servi. Je
savais reconna?tre,du premier coup
d’oeil, la Chine de l’Arizona.C’est
très utile, si l’on s’est égaré pendant la
nuit.
J’ai ainsi eu,au cours de ma vie,des
tas de contacts avecdes tas de gens sérieux. J’ai
beaucoup
vécu chez les grandes les ai
vues de très près.?a n’a pas trop amélioré mon
opinion.
Quand
j’en
rencontrais
une
qui
me
paraissait
un
peu
lucide,je
faisais
l’expérience
sur
elle de
mon
dessin
numé
ro
1
que
je
toujours
conservé
.Je
voulais
savoir
si
elle
é
tait
vraiment
compré
toujours elle me ré
pondait
:
《
C’est un
chapeau.
》
Alors je ne lui
parlais ni de
serpents boas,ni de
forêts vierges,ni d’é me mettais à sa porté lui
parlais de bridge,de
golf,de politique
et de la grande personne é
tait bien
contente de conna?
tre un homme
aussi raisonnable......
2
J’ai
ainsi
vécu
seul,sans
personne
avec
qui
parler
véritablement,jusqu’à
une
panne
dans
le
dé
sert du Sahara,il y a six
e
chose s’était cassé dans mon comme
je n’avais
avec moi ni
mé
canicien,ni
passagers,je me pré
parai
à
essayer de ré
ussir,tout
seul,une ré
paration
difficile.c’était pour moi une question
de vie ou de mort.J’avais à peine de l’eau à boire
pour huit
jours.
Le premier soir je me suis
donc endormi sur le sable à mille milles de toute
terre habitée.J’étai
s
bien
plus
isolé
qu’un
naufragé
sur
un
radeau
au
milieu
de
l’océan.
Alors
vous
imaginez
ma
surprise,au lever du jour,quand une
dr?le de petite voix m’a réveillé.Elle
disait
:...
《
S’il vous
pla?t...dessine
-moi un
mouton!
》
- Hein!
- Dessine-moi un
mouton...
》
J’ai
sauté
sur
mes
pieds
comme
si
j’avais
été
frappé
par
la
foudre.J’ai
bien
frotté
mes
yeux.J’ai
bien
regardé.Et j’ai vu un petit bonhomme tout à fait
extraordinaire qui me considérait
à le
meilleur portrait que,plus tard,j’ai réussi à
f
aire de mon dessin,bien
s?r,est
beaucoup
moins
ravissant
que
le
modè
n’est
pas
ma
faute.J’avais
été
découragé
dans ma carrière
de peintre par les grandes personnes,à l’?ge de
six ans,et je n’avais rien appris
à
dessiner,sauf les boas
fermé
s et les boas ouverts.
Je regardai donc cette
apparition avec des yeux tout ronds d’étonnement.
N’oubliez pas que
je me trouvais
à
mille milles de toute
ré
gion habité
mon petit
bonhomme ne me semblait ni
é
garé
,ni
mort
de
fatigue,ni
mort
de
faim,ni
mort
de
soif,ni
mort
de
n’avait
en
rien
l’apparence d’un enfant perdu au milieu
du désert,à mille milles de toute région habité
je ré
ussis enfin
à
parler je lui dis :
《
Mais...qu’est
-ce
que tu fais là
?》
Et il me
ré
pé
ta alors,tout
doucement,comme une chose trè
s
sé
rieuse :
《
S’il vous
pla?t...dessine
-moi un
mouton...
》
Quand le mystère est trop
impressionnant,on n’ose pas désobé absurde que
cela me
sembl?
t à
mille milles de tous les endroits
habité
s et en danger de mort,je sortis
de ma poche
une feuille de papier et un
je me rappelai alors que j’avais surtout étudié la
géographie,l’histoire,le
calcul
et
la
grammaire
et
je
dis
au
petit
bonhomme(avec
un
peu
de
mauvaise
humeur)que je ne savais pas me
ré
pondit :
《
?a ne fait e-moi un
mouton.
》
Comme je n’avais jamais
dessiné un mouton je refis,pour lui,l’un des deux
seuls dessins dont
j’étais
du
boa
fermé.Et
je
fus
stupéfait
d’entendre
le
petit
bonhomme
me
ré
pondre :
《
Non! Non! Je ne
veu
x pas d’un éléphant dans un boa
c’est très dangereux,et un
éléphant
c’est très moi c’est tout petit.J’ai besoin d’un
e
-moi
un
mouton.
》
Alors j’ai
dessiné.
Il regarda attentivement,puis :
《
Non! Celui-là
est dé
jà
trè
s -en
un autre.
》
Je seeinai :
Mon ami sourit
gentiment,avec indulgence :
《
Tu vois
bien...ce n’est pas un mouton,c’est un bé a des
cornes...
》
Je refis donc encore mon
dessin :
Mais
il fut refusé
,comme les
pré
cé
dents :
《
Celui-
là
est trop veux un mouton qui vive
longtemps.
》
Alors,faute
de
patience,comme
j’avais
h?te
de
commencer
le
démontage
de
mon
moteur,je
griffonnai ce dessin-ci :
Et
je lan?
ai :
《
?a
c’est la mouton que tu veux est
dedans.
》
Mais je
fus bien
surpris de voir s’illuminer le
visage de mon jeune juge
:
《
C’est tout à fait comme ?a
que je le voulais! Crois
-
tu
qu’il faille beaucoup
d’herbe à ce
mouton
?
-
Pourquoi
?
-
Parce que chez moi c’est tout
petit...
-
?a
suffira s? t’ai donné un tout p
etit
mouton.
》
Il
pencha la tê
te vers le dessin :
《
Pas
si petit que
?a...Tiens! Il s’est
endormi...
》
Et
c’est ainsi que je fis la connaissance du petit
prince.
3
Il me
fallut longtemps pour comprendre d’où il petit
prince,qui me
posait
beaucoup de questions,ne semblait jamais entendre
les sont des mots prononcé
s
par
hasard
qui,peu
à
peu,m’ont
tout
p>
ré
vé
lé
.A
insi,quand
il
aper?
ut
pour
la
premiè
re
fois
mon
avion(je
ne
dessinerai
pas
mon
avion,c’est
un
dessin
beaucoup
trop
compliqué
pour
moi)
il
me
demanda :
《
Qu’est
-
ce que c’est que cette
chose
-là
?
-
Ce n’est pas une chose.?a
vole.C’est un avion.C’est mon
avion.
》
Et
j’étais fier de lui apprendre que je il
s’écria
:
《
Comment! tu es
tombé
du ciel!
》
-
Oui, fis-je
modestement.
-
Ah! ?a c’est
dr?le!...
》
Et le petit prince eut un
très joli éclat de rire qui m’irrita désire que
l’on prenne
mes malheurs au
sé
il ajouta :
《
Alors,toi aussi tu viens du
ciel! De quelle planè
te es-
tu
?》
J’entrevis aussit?t une lueur,dans le
mystère de da présence,et j’interrogeai
brusquement
:
《
Tu viens donc d’une autre
planète
?》
Mais il ne me
pé
pondit hochait la tê
te
doucement tout en regardant mon avion :
《
C’est vrai
que,là
-dessus,tu ne peux pas venir de
bien loin...
》
Et il s’enfon?a
dan
s une rê
verie qui dura
,sortant mon mouton de sa poche,il se
plongea dans la contemplation de son
tré
sor.
Vous
imaginez
combien
j’avais
pu
être
intrigué
par
cette
demi
-confidence
sur
《
les
autres
planè
tes
p>
》
. Je m’effor?ai donc d’en
savoir plu
s long :
《
D’où
viens
-tu,mon
petit
bonhomme
?
p>
Où
est-
ce“chez
toi”<
/p>
?
Où
veux-tu
emporter
mon
mouton
?》
Il me
ré
pondit aprè
s un silence
mé
ditatif :
《
Ce qui est bien,avec la
caisse que tu m’as donnée,c’est que,la nuit,?a lui
servira de maison.
- Bien s?
si tu es gentil,je te donnerai aussi
une corde pour l’attacher pendant le un
piquet.
》
La proposition
parut choquer le petit prince :
《
L’attacher
?
Quelle dr?le d’idée!
-
Mais si tu ne l’attaches pas,il ira
n’importe où,et il se
perdra.
》
Et mon ami eut un nouvel
é
clat de rire :
《
Mais où
veux-
tu qu’il aille!
-
N’importe où.Droit devant
lui...
》
Alors le petit price
remarqua gravement :
《
?a ne fait rien, c’est
tellement petit,chez moi!
》
Et,avec un peu
de mé
lancolie,peut-ê
tre,il
ajouta :
《
Droit devant soi on ne peut
pas aller bien loin...
》
4
J’avais
ainsi
appris
une
seconde
chose
très
importante
:c’est
que
sa
planète
d’orgine
était
à
peine
plus grande qu’une maison!
?a ne pouvait pas m’étonner
savais bien qu’en dehors de
s grosses
planè
tes comme
la
Terre,Jupiter,Mars,Vénus,auxquelles on a donné des
noms,il y en a des centaines d’autres qui
sont
quelquefois
si
petites
qu’on
a
beaucoup
de
mal
à
les
apercevoir
au
télé
un
astronome
découvre
l’une
d’elles,il
lui
donne
pour
nom
un
numé
l’appelle
par
exemple
:
《
l’astéro?de
325
》
.
J’ai
de
sérieuses
raisons
de
croire
que
la
planète
d’où
venait
le
petit
prince
est
l’astéro?
de
B
astéro?de n’a été aper?u qu’une fois
au téléscope,en 1909,par un astronome
turc.
Il
avait
fait
alors
une
grande
dé
monstration
de
sa
dé
couverte
à
un
congrè
s
international
d’
personne
ne
l’avait
cru
à
cause de
son
costume.
Les
grandes
personnes
sont
comme ?
a.
Heureusement
pour
la
réputation
de
l’astéro?de
B
612,un
dictateur
turc
imposa
à
son
peuple,sous
peine
de
mort
,de
s’habiller
à
l’européenne.L’astronome
refit
sa
démonstration
en
1920,dans un habit trè
s
é
lé
cette fois-ci tout le
monde fut de son avis.
Si je vous ai raconté ces détails sur
l’astéro?de B 612 et si je vous ai confié son
numéro,c’est à
cause
des
grandes
grandes
personnes
aiment
les
vous
leur
parlez
d’un
nouvel
ami,elles
ne
vous
questionnent
jamais
sur
l’
ne
vous
disent
jamais
:
《
Quel
est
le
son
de
sa
voix
?
Quels
sont
les
jeux
qu’il
préfère
?
Est-
ce
qu’il
collectionne
les
papillons
?》
Elles
vous
demandent
:
《
Quel
?
ge
a-t-
il
?
Combien
a-t-il
de
frè
res
< br>?
Combien
pè
se-
t-il
?
Combien gagne son
pè
re
?》
Alors
seulement elles croient le conna?
vous
dites aux
grandes personnes
:
《
J’ai vu une belle maison
en briques roses
,avec des
gé
raniums aux fenê
tres et
des colombes sur le
toit...
》
,elle ne parviennent
pas à s’imgainer cette faut leur dire
:
《
J’ai
vu une
maison de cent mille
francs
》
.
Alors
elles s’écrient
:
《
Comme c’est
joli!
》
Ainsi,si vous
leur dites,
《
La
preuv
e que le petit prince a existé
c’est qu’il était ravissant,qu’il
riait,et
qu’il
voulait
un
on
veut
un
mouton,c’est
la
preuve
qu’on
existe
》
,elles
huasseront
les
épaules
et
vous
raiteront
d’enfant!
Mais
si
vous
leur
dites
:
《
La
planète
d’où
il
ve
nait est l’astéro?de B
612
》
,alors elles seront
convaincues,et elles vous laisseront tranquille
avec
leurs sont comme ?
ne
faut pas leur
en vouloir.
Les enfants doivent ê
tre
trè
s
indulgents envers les
grandes personnes.
Mais bien
s?
r,n
ous qui comprenons la
vie,nous nous moquons bien des numéros! J’aurais
aimé
commencer cette histoire à la
fa?con des contes de fées.J’aurais aimé
dire
:
《
Il é
tait une
fois un petit prince qui habitait une
planè
te à
peine plus grande
que lui,et qui avait
besoin d’un
ami...
》
Pour ceux qui
comprennent la vie,?a aurait eu l’air beaucoup
plus vrai.
Car
je
n’aime
pas
qu’on
lise
mon
livre
à
la
légère.J’éprouve
tant
de
chagrin
à
raconter
ces
y
a
six
ans
déjà
que
mon
ami
s’en
est
allé
avec
son
j’essaie
ici
de
le
décrire,c’est
afin
de
ne
pas
l’oublier.C’est
triste
d’oublier
un
le
monde
n’a
pas
eu
un
je puis
devenir comme les grandes personnes qui ne
s’intéressent plus qu’aux chiffres.C’est
donc pour ?a encore que j’ai acheté une
bo?te de couleurs et des crayons.C’est dur de se
remettre
au dessin,à mon ?ge,quand on
n’a jamais fait d’autres tentatives que celle d’un
boa fermé et celle
d’un boa ouvert,à
l’?ge de six ans! J’essaierai,bien s?r,de faire
des portraits le plus ressembl
ants
je
ne
suis
pas
tout
à
fait
certain
de
ré
dessin
va,et
l’autre
ne
ressemble
me
trompe
un
peu
aussi
sur
la
le
petit
prince
est
trop
grand.Là
il
est
trop
petit.J’hésite aussi sur la couleur de
son je
t?
tonne comme ci et
comme ?
a,tant bien
que
me
tromperai
enfin
sur
certains
dé
tails
plus
?
a,il
faudra
me
le
ami ne
donnait jamais d’ me croyait
peut
-ê
tre semblable
à
moi,malheureusement,je ne
sais pas voir les moutons à
travers les
suis peut-ê
tre un peu
comme
les grandes personnes.J’ai d? vieillir.
5
Chaque jour j’apprenais quelque chose
sur la planète sur le départ,sur le voyage. ?a
venait tout
doucement,au
hasard
des
réflexions.C’es
t
ainsi
que,le
troisiè
me
jour,je
connus
le
drame
des
baobabs.
Cette fois-
ci
encore ce fut gr?ce au mouton,car brusquement le
petit prince m’interrogea,comme
pris
d’un doute grave
:
《
C’est bien
vrai,n’est
-ce pas,que les moutons
mangent les arbustes
-
Oui.c’est vrai.
-
Ah! Je suis
content!
》
Je ne compris pas pourquoi
il é
tait si important que les moutons
mangesssent les
le petit prince ajouta
:
《
Par consé
quent
ils mangent aussi les
baobabs
?》
Je fis remarquer au petit
prince que les baobabs ne sont pas des
arbustes,mais des arbres grands
comme
des églises et que,si même il emportait avec lui
tout un troupeau d’éléphants,ce troupeau
ne viendrait pas à bout d’un seul
baobab
.
L’idée du troupeau d’éléphants fit rire
le petit prince
:
《
Il faudrait les
mettre les uns sur les
autres...
》
Mais il remarqua avec
sagesse :
《
Les baobabs,avant de
grandir,?
a commence par ê
tre
petit.
-
C’est exact! Mais pouquoi
veux
-tu que tes moutons mangent les
petits baobas
?》
Il me ré
pondit
:
《
Ben!
V
oyons!
》
,comme
s’il s’agissait là d’une é il me fallut un grand
effort d’intelligence pour comprendre à
moi seul ce problème.
Et
en
effet,sur
la
planè
te
du
petit
prince,il
y
avait,comme
sur
toutes
les
planè
tes,de
bonnes
herbes et de
mauvaises consé
quent de bonnes graines
de bonnes herbes et de mauvaises
graines
de
mauvaises
les
graines
sont
dorment
dans
le
secret
de
la
terre
jusqu’à
ce
qu’il
prenne
frantaisie
à
l’une
d’elles de
se
ré
elle
s’étire,et
pousse
d’abord
timidement
ves
le
soleil
une
ravissante
petite
brindille
inoffensive.S’il
s’agit
d’une
brindille de radis ou
de rosier,on peut la laisser pousser comme elle
veut. Mais s’il s’agit d’une
mauvaise
plante,il faut arracher la plante aussit?t,dès
qu’on a su la reconna? il y avait des
graines terribles sur la planète du
petit prince...c’étaient les graines de sol de la
planète
en était infesté.Or un
baobab,si l’on s’y prend trop tard,on ne peut
jamais plus s’en dé
encombre
toute
la
planè
la
perfore
de
ses
si
la
planè
te
est
trop
petite,et
si
les
baobabs sont trop
nombreux,ils la font é
clater.
《
C’est
une
question
de
discipline,
me
disait
plus
tard
le
petit
on
a
terminé
sa
toilette
du
matin,il
faut
faire
soigneusement
la
toilette
de
la
planète.
Il
faut
s’astreindre
régulièrement
à
arracher
les
baobabs
dès
qu’on
les
distingue
d’avec
le
s
rosiers
auxquels
ils
ressemblent beaucoup
quand ils sont très jeunes. C’est un travail très
ennuyeux,mais très facile.
》
Et un jour il
me conseilla de m’appliquer à réussir un beau
dessin,pour bien faire entrer ?a dans
la tê
te des enfants de chez
moi.
《
S
’ils
voyagent un jour,me
disait
-il, ?
a pourra leur
est
quelquefois sans inconvénient de
remettre à plus tard son s’il s’agit des
baobabs,c’est
toujours
une
catastrophe.J’ai
connu
une
planète,habitée
par
un
avait
négligé
trois
arbustes...
》
Et,sur les
indications du petit prince,j’ai dessiné cette
planète
-
là.Je n’aime guère
prendre le ton
d’un
le
danger
des
baobabs
est
si
peu
connu,et
les
risques
courus
par
celui
qui
s’égarerait
dans
un
astéro?de
sont
si
considérables,que,p
our
une
fois,je
fais
exception
à
ma
ré
dis
:
《
Enfants! Faites attenton
aux baobabs!
》
C’est pour
avertir mes amis d’un danger
qu’ils
fr?laient
depuis
longtemps,comme
moi
-
même,sans
le
conna?tre,que
j’ai
tant
travaillé
ce
dessin-là
.La
le?
son
que
je
donnais
en
valait
le
peine.V
ous
vous
demanderez
peut-ê
tre :Pourquoi
n’y a
-t-
il
pas,dans ce livre,d’autres dessins aussi
grandioses que le dessin de
baobabs
?
La
ré
ponse
est
bien
simple
:J’ai
essayé
mais
je
n’ai
pas
pu
ré
j’ai
dessiné
les
baobabs
j’ai
é
té
animé par le sentiment de
l’urgence.
Ah! petit prince,j’ai compris,peu à
peu,ainsi,ta petite vie mé n’avais eu longtemps
pour distraction que la douceur des
couchers de soleil.J’ai appris ce détail
nouveau,le quatrième
jour au
matin,quan
d tu m’as dit
:
《
J’aime bien le couchers de
voir un coucher de soleil...
-
Mais il faut
attendre...
-
Attendre quoi
?
-
Attendre que le
soleil se couche.
》
Tu as eu l’air
très surpris d’abord,et puis tu as ri de
toi
-
mê tu m’as
dit
:
《
Je me crois toujours chez
moi!
》
En
il
est
midi
aux
?
tats-Unis,le
soleil,tout
le
monde
le
sait,se
couche
sur
la
suffirait
de
pouvoir
aller
en
France
en
une
minute
pour
assister
au
coucher
du
reusement la France est ien trop
é
loigné
,sur ta si petite
planè
te,il te suffisait de
tirer ta chaise de quelques tu
regardais le cré
puscule chaque fois que
tu ledé
sirais...
《
Un jour,j’ai vu
le soleil se coucher quarante
-quatre
fois!
》
Et un peu plus tard tu
ajoutais :
《
Tu sais...quand on est
tellement triste on aime les couchers de soleil...
- Le jour des
quatrante-quatre fois,tu é
tais donc
tellement triste
?》
Mais le petit prince ne
ré
pondit pas.
6
Le cinquiè
me
jour,toujours gr?
ce au mouton,ce secret
de la vie du petit prince me fut
ré
vé
lé
.Il
me demanda avec brusquerie,sans
préambule,comme le fruit d’un problème longtemps
médité en
silence :
《
Un mouton,s’il
mange les arbustes,il mange aussi les
fleurs
?
-
Un mouton mange
tout ce qu’il rencontre.
-
Mê
me
les fleurs qui ont des
é
pines
?
-
Oui.Mê
me les fleurs qui ont
des é
pines.
-
Alors les
é
pines,à
quoi servent-
elles
?》
Je ne le savais pas.J’étais
alors très occupé à essayer de dévisser un boulon
trop serré de mon
moteur.J’étais très
soucieux car ma panne commen?ait de m’appara?tre
comme très grave,et l’eau
à boire qui
s’épuisait me faisait craindre le pire.
《
Les
é
pines,à
quoi servent-
elles
?》
Le petit prince ne
renon?ait jamais à une question,une fois qu’il
l’avait posée. J’étais irrité par
mon
boulon et je répondis n’importe quoi
:
《
Les
é
pine
s,?a ne sert à
rien,c’est de la pure méchanceté de la part des
fleurs!
- Oh!
》
Mais
aprè
s un silence il me lan?
a
avec une sorte de rancune :
《
Je ne te crois
pas! Les fleurs sont sont na?
se
croient terribles avec leurs
é
pines...
》
Je ne ré
pondis
rien.? cet instant-là
je me disais
:
《
Si ce boulon
ré
siste encore,je le ferai sauter
d’un coup de
marteau.
》
Le petit prince
dé
rangea de nouveau mes
ré
flexions :
《
Et tu crois,toi,que les
fleurs...
-
Mais non! Mais non! Je ne crois rien!
J’ai répondu n’importe m’occupe,
moi,de choses
sé
rieuses!
》
Il me regarda stupé
fait.
《
De
choses
sé
rieuses!
》
Il me
voyait,mon marteau à
la main,et les
doigts noirs de cambouis,penché
sur un
objet qui lui
semblait trè
s
laid.
《
Tu parles comme les grandes
personnes!
》
?a me fit un peu
impitoyable,il ajouta :
《
Tu confonds tout...tu
mé
langes tout!
》
Il
é
tait vraiment trè
s
irrité
.Il secouait au vent des cheveux
tout doré
s :
《
Je connais une
planè
te où
il y a un
monsieur
n’a jamais respiré une n’a
jamais
regardé
une
é
n’a
jamais
aimé
n’a
jamais
rien
fait
d’autre
que
des
toute la
journé
e il ré
pè
te
comme toi
: “Je suis un homme sérieux!
Je suis un homme
sérieux!”,et ?a le
fait gonfler d’ ce n’est pas un homme,c’est un
champion!
-
Un quoi
?
-
Une
champion!
》
Le petit prince
é
tait maintenant tout p?
le
de colè
re.
《
Il y a des millions
d’années que les fleurs fabriquent des é y a des
millions d’années
que les moutons
mangent quand même les ce n’est pas sérieux de
chercher à c
omprendre
pourquoi elles se donnent tant de mal
pour se fabriquer des é
pines qui ne
servent jamais à
rien
?
Ce
n’est
pas
important
la
guerre
des
moutons
et
des
fleurs
?
Ce
n’est
pas
plus
sérieux
et
plus
important que les additions d’un gros
monsieur rouge
?
Et si je
connais,moi,une fleur unique au
monde,
qui n’existe nulle part,sauf dans ma
planète,et qu’un petit mouton peut anéantir d’un
seul
coup,comme ?a,un matin,sans se
rendre compte de ce qu’il fait,ce n’est pas
important ?a!
》
Il rougit,puis reprit :
《
Si
quelqu’un aime une fleur qui n’existe
qu’à un exemplaire dans les millions et les
millions
d’étoiles,?a suffit pour qu’il
soit heureux quand il les regarde. Il se
dit
:“Ma fleur est là
quelque
part...”Mais,si
le
mouton
mange
la
fleur,c’est
pour
lui
comme
si,brusquement,toute
les
é
toiles
s’éteignaient! Et ce n’est pas
important ?a!
》
Il ne put rien dire de
éclata brusquement en nuit était tombée. J’avais
l?ché
mes
me
moquais
bien
de
mon
marteau,de
mon
boulon,de
la
soif
et
de
la
y
avait,sur
une
é
toile,une
planè
te,la
mienne,la
Terre,un
petit
prince
à
consoler!
Je
le
pris
dans
les
le
ber?
lui disais
:
《
La fleur que tu aimes
n’est pas en danger...Je lui dessinerai une
museilè
re,à
ton
mouton... Je te dessinerai une armure pour ta
fleur...Je...
》
Je ne savais
pas trop quoi
dire.
Je
me
sentai
s
très
ne
savais
comment
l’atteindre,où
le
rejoindre...
C’est
tellement mysté
rieux,le pays
des larmes!
7
J’appris
bien
vite
à
mieux
conna?tre
cette
y
avait
toujours
eu,sur
la
planète
du
petit
prince,des fleurs très simples,ornées
d’
un seul rang,de pé
tales,et
qui ne tenaient point de place,et
qui
ne dérangeaient apparaissaient un matin dans
l’herbe,et puis elles s’éteignaient
le
celle-
là
avait
germé
un
jour,d’une graine
apportée
d’on
ne
sait
où,et
le
petit
pri
nce
avait
survillé
de trè
s
prè
s cette brindille qui ne ressemblait
pas aux autres brindilles. ?a pouvait
être un nouveau genre de l’arbuste
cessa vite de cro?tre,et commen?a de préparer une
petit prince,qui assistait
à l’installation d’un bouton énorme,sentait bien
qu’il en sortirait
une apparition
miraculeuse,mais la fleur n’en finissait pas de se
préparer à être belle,à l’abri de sa
chabmre verte. Elle choisissait avec
soin ses s’habillait lentement,elle ajustait un à
un
ses
pé
ne
voulait
pas
sortir
toute
fripé
e
comme
ls
coquelicots.
Elle
ne
voulait
appara?
tre que dans le plein
ayonnement de sa beauté
.Eh!
é
tait trè
s coquette! Sa
toilette
mysté
rieuse avait
donc duré
des jours et des jours. Et
puis voici q
u’un matin,justement à
l’heure
du lever du soleil,elle s’était
montrée.
Et elle,qui avait travaillé
avec tant de pré
cision,dit en
b?
illant :
《
Ah! je me
ré
veille à
peine...Je vous
demande pardon...Je suis encore toute dé
coiffé
e...
》
Le petit
prince,alors,ne put contenir son admiration :
《
Que
vous ê
tes belle!
-
N’est
-ce
pas,ré
pondit doucement la je suis
né
e en mê
me temps que le
soleil...
》
Le petit prince devina bien
qu’elle n’était pas trop modeste,mais elle était
si émouvante!
《
C’est
l’heure,
je
crois,du
petit
déjeuner,
avait
-elle
bient?
t
ajouté
,
auriez-
vous
la
bonté
de
penser à
moi...
》
Et le petit prince,tout
confus,ayant é
té
c
hercher un arrosoir d’eau
fra?che,avait servi la fleur.
Ainsi
l’avait
-elle
bien
vite
tourmenté
par
sa
vanité
un
peu
jour,
par
exemple,parlant de ses
quatre é
pines,elle avait dit au petit
prince :
《
Ils peuvent vienir,les
tigres,avec leurs griffes!
-
Il n’y a pas de tigres sur ma
planète,avait objecté le petit prince,et puis les
tigres ne mangent
pas
d’herbe.
- Je ne suis pas
une herbe,avait doucement ré
pondu la
fleur.
- Pardonnez-moi...
-
Je
ne
crains
rien
des
tigres,
mais
j’ai
horreur
des
courants
d’air.
V
ous
n’auriez
pas
un
paravent
?》
《
Horreur
des
courants
d’air...ce
n’est
pas
de
chance,pour
une
plante,avait
remarqué
le
petit
fleur
est bien
compliqué
e...
》
《
Le
soir vous me mettrez sous fait très froid chez
vous.C’est mal installé. Là d’où je
viens...
》
Mais
elle s’était était venue sous forme de
n’avait rien pu conna?tre
des
autres
ée
de
s’être
laissé
surprendre
à
préparer
un
mensonge
aussi
na?f,elle
avait
toussé
deux ou trois fois,pour mettre
le petit prince dans son tort :
《
Ce
paravent
?
...
-
J’allais le
chercher mais vous me
parliez!
》
Alorià
s elle
aviat forcé
sa toux pour lui infliger
quand mê
me des remords.
Ainsi le petit
prince,malgré la bonne volonté de son amour,avait
vite douté d’elle. Il avait pris
au
sé
rieux des mots sans importance,et
é
tait devenu trè
s
malheureux.
《
J’aurais d? ne pas
l’éccouter,me confia
-t-il un jour,il ne
faut jamais é
ccouter les faut
les
regarder
et
les
mienne
embaumait
ma
planète,mais
je
ne
savais
pas
m’en
ré
e histoire de
griffes,qui m’avait tellement agacé,êut d?
m’attendrir...
》
Il me confia encore :
《
Je
n’ai alors rien su comprendre! J’aurais d? la
juger sur les actes et non sur les
m’embaumait et m’é n’aurais
d?
m’enfuir! J’aurais
d
?
deviner sa tendresse
derriè
re ses
pauvres fleurs
sont si contradictoires!Mais j’étais trop jeune
pour savoir l’aimer.
》
8
Je
crois qu’il profita,pour son évasion,d’une
migration d’oiseaux matin du départ
il
mit sa planè
te bien en ramona
soigneusement ses volcans en
activité
.Il possé
dait deux
volcans
en
activité.Et
c’était
bien
commode
pour
faire
chauffeur
le
petit
déjeuner
du
possé
dait
ausi
un
volcan
é
teint.
Mais,
comme
il
disait
:
《
On
ne
siat
jamais!
》
Il
ramona
donc
également le volcan éteint. S’ils sont
bien ramonés,les volcans br?lent doucement et
régulièrement,
sans é
é
ruptions volcaniques sont comme des
feux de cheminé
e.?
videmment
sur notre
terre nous sommes beaucoup
trop petits pour ramoner nos
volca
ns.C’est pourquoi ils nous causent
des tas d’ennuis.
Le
petit
prince
arracha
aussi,avec
un
peu
de
mé
lancolie,les
derniè
res
pousses
de
croyait
ne
jamais
devoir
tous
ces
travaux
familiers
lui
parurent,ce
matin-là
,
extrê
mement doux.
Et,quand il arrosa une dernière fois la
fleur, et se prépara à la mettre à l’abri
sous son globe,il se découvrit l’envie
de pleurer.
《
Adieu
》
,d
it-il à
la fleur.
Mais elle ne lui
ré
pondit pas.
<
/p>
《
Adieu
》
,ré
pé
ta-t-il.
La fleur ce n’était pas
à
caouse de son rhume.
《
J’ai été sotte,lui
dit
-
elle te demande
pardon.T?che d’être
heureux.
》
Il
fut
surpris
par
l’absence
de
restait
là
tout
déconcerté,le
globe
en
l’
ne
comprenait pas cette douceur calme.
《
Mais
oui,je
t’aime,lui
dit
la
n’en
as
rien
su,par
ma
n’a
aucune
tu as été aussi sot que moi.T?che
d’être heureux...Laisse ce globe
n’en
veux plus.
- Mais le vent...
-
Je ne suis pas si enrhumée
que ?a...L’air frais de la
nuit me fera
du suis une fleur.
- Mais les
bê
tes...
- Il faut bien que
je supporte deux ou trois chenilles si je veux
conna?
tre les para?
t
que c’est tellement qui me
rendra visite
?
Tu
seras loin, aux grosses bê
tes,je
ne crains rien.J’ai me
griffes.
》
Et elle montrait
na?
vement ses quatre é
elle
ajouta :
《
Ne tra?ne pas comme
?a,c’est aga? as décidé de
-
t’en.
》
Car elle ne voulait pas
qu’il la v?t
pleurer.C’était
une fleur tellement orgueilleuse...
9
Il
se trouvait dans la ré
gion des
asté
ro?
des
325,326,327,328,329 et commen?
a donc
par
les visiter pour y chercher une
occupation et pour s’instruire.
Le premier
é
tait habité
par un
ro
i siégeait,habillé de pourpre et
d’hermine, sur un tr?ne
trè
s
simple et cependant majestueux.
《
Ah!
Voilà
un
sujet!
》
,s’écria
le
roi
quand
il
aper?ut
le
petit
le
petit
prince
se
demanda :
《
Comment peut-
il
me reconna?tre puisqu’il ne m’a encore jamais
vu!
》
Il ne savait pas que,pour les rois,le
monde est trè
s
simplifié
.Tous les hommes sont des
sujets.
《
Approche-toi
que
je
te
voie
mieux
》
,lui
dit
le
roi
qui
était
tout
fier
d’être
enfin
roi
pour
quelqu’un.
Le
petit
prince
chercha
des
yeux
où
s’asseoir,mais
la
planète
était
tout
encombrée
par
le
magnifique
manteau d’ resta donc d
ebout,et,comme
il é
tait faitgué
,il
h?
illa.
《
Il est contraire à
l’étiquette de b?iller en présence d’un roi,lui
dit le te l’interdis.
-
Je ne peux pas m’en empêcher,répondit
le petit prince tout confus.J’ai fait un long
voyage et je
n’ai pas
d
ormi...
-
Alors,lui
dit
le
roi,je
t’ordonne
de
b?
n’ai
vu
personne
b?iller
depuis
de
anné
b?illements sont pour
moi des curiosité!b?ille encore.C’est un
ordre.
-
?a
m’intimide...je ne peux plus...,fit le petit
prince tout rougissant.
-
Hum! Hum! répondit le je...je
t’ordonne tant?t de b?iller et tant?t
de...
》
Il bredouillait un peu et
paraissait vexé
.
Car
le
roi
tenait
essentiellement
à
ce
que
son
autorité
f?
t
respecté
ne
tolé
rait
pas
la
désobéissance.C’était
un
monarque
,comme
il
était
très
bon,il
donnait
des
ordres
raisonnables.
《
Si
j’o
rdonnais,disait-
il
couramment,si
j’ordonnais
à
un
général
de
se
changer
en
oiseau
de
mer,et si le général
n’obéissait pas,ce ne serait pas la faute du géné
serait ma faute.
》
《
Puis-
je
m’asseoir
?
s’enquit
timidement le petit pricne.
-
Je
t’ordonne
de
t’asseoir
》
,lui
ré
pondait
le
roi,qui
ramena
majestueusement
un
pan
de
son
manteau d’hermine.
Mais
le
petit
prince
s’é
planète
était
quoi
le
roi
pouvait
-il
bien
ré
gner
?
《
Sire,lui dit-il...je vous
demande pardon de vous interroger...
-
Je t’ordonne de
m’interroger,se h?ta de dire le roi.
-
Sire...sur quoi
ré
gnez-vous
?
-
Sur
tout,ré
pondit le roi,avec une grande
simplicité
.
-
Sur tout
?》
Le roi d’un
geste discret désigna sa planète,les autres
planètes et les étoiles.
《
Sur tou
?
a
?
dit le petit
pricne.
- Sur
tou ?
a...
》
,ré
pondit le roi.
Car non seulement c’était un monarque
absolu mais c’était un monarque
universel.
《
Et les é
toiles
vous obé
issent
?
-
Bien s?r,lui dit le obéissent
aussit?t. Je ne tolère pas
l’indiscipline.
》
U
n
tel
pouvoir
émerveilla
le
petit
prince.S’il
l’avait
détenu
lui
-mê
me,il
aurait
pu
assister,non
pas
à
quarante-quatre,mais à
soixante-douze,ou mê
me à
cent,ou mê
me à
deux cents
couchers de
soleil dans la
mê
me journé
e,sans avoir
jamais à
tirer sa chaise! Et comme il
se sentait un peu triste
à cause du
souvenir de sa petite planète abandonnée,il
s’enhardit à solliciter une gr?ce du
roi
:
《
Je voudrais voir un coucher
de soleil...Faites-moi plaisir...Ordonnez au
soleil de se coucher...
-
Si j’ordonnais à un
général de voler d’une fleur à l’autre à la fa?on
d’un papillon,ou d’écrire
une
tragé
die,ou de se changer en oiseau de
mer,et si le gé
néral n’exécutait pas
l’ordre re?u,qui,de
lui ou de
moi,serait dans son tort
- Ce serait vous,dit fermement le petit
prince.
-
faut exiger de chaun ce que chacun
peut donner,reprit le roi.L’autorité repose
d’abord
sur la tu ordonnes
à ton peuple d’aller se jeter à la
mer,il fera la révolution.J’ai le droit
d’exiger l’obéissance parce que mes
ordres sont raisonnables.
- Alors mon coucher de
soleil
?
rappela le petit
pricne qui jamais n’oubliait une question une
fois qu’il l’avait posée.
-
Ton
coucher
de
soleil,tu
l’auras,Je
l’
j’attendrai,dans
ma
science
du
gouvernement,que les conditions soient
favorables.
-
Quand ?
a sera-t-
il
?
s’inf
orma le
petit prince.
-
Hem!
Hem!lui
répondit
le
roi,qui
consulta
d’abord
un
gros
calendrier,hem!hem!ce
sera,vers...vers...ce sera ce soir vers
sept heures quarante! Et tu verras comme je suis
bien obé
i.
》
Le
petit
prince
b?
regrettait
son
couche
r
de
soleil
manqué.Et
puis
il
s’ennuyait
déjà
un
peu :
《
Je n’ai plus
rien à faire ici,dit
-il au vais
repartir!
-
Ne pars pas,répondit le roi qui était
si fier d’avoir un pars pas,je te fais
ministre!
- Ministre de
quoi
?
- De...de la Justice!
-
Mais il n’y personne à
juger!
-
On ne sait pas,lui dit le
n’ai pas fait encore le tour de mon suis très
vieux,je
n’ai pas de place pour un
carrosse,et ?a me fatigue de marcher.
-
Oh! Mais j’ai déjà vu,dit le petit
prince
qui se pencha pour
jeter encore un coup d’oeil sur
l’autre
c?té de la planè n’y a personne là
-bas
non plus...
-
Tu te jugeras donc toi-
même,lui
répondit le roi.C’est le plus est bien plus
difficile
de se juger soi-
mê
me que de juger aut
tu
réusiis à bien te juger,c’est que tu es un
véritable
sage.
- Moi,dit le petit prince,je puis me
juger moi-
même n’importe où.Je n’ai pas
besoin d’habiter
ici.
-
Hem!
Hem!dit
le
roi,je
crois
bien
que
sur
ma
planè
te
il
y
a
quelque
part
un
vieux
l’entends
la
pourras
juger
ce
vieux
le
condamneras
à
mort
de
temps
en
,sa vie dépendra de ta tu le gracieras
chaque fois pour l’é n’y
en a
qu’un.
-
Moi,répondit le petit
prince,je n’aime pas condamner à mort,et je crois
bien que je m’en vais.
-
Non
》
,dit le roi.
Mais le petit prince,ayant
achevé
ses pré
paratifs,ne
voulut point peiner le vieux monarque :
《
Si
votre
Majesté
dé
sirait
ê
tre
obé
ie
ponctuellement,Elle
pourrait
me
donner
un
ordre
raiso
pourrait m’ordonner,par exemple,de partir avant
une minute. Il me semble que les
conditions sont
favorables...
》
Le roi n’ayant rien
répondu,le petit prince hésita d’abord,puis,avec
un soupir, prit le départ...
《
Je
te fais mon ambassadeur
》
,se
h?
ta alors de crier le roi.
Il avait un grand air
d’autorité.
《
Les
grandes
personnes
sont
bien
é
tranges
》
,se
dit
le
petit
prince,
en
lui-
mê
me,durant
son
voyage.
10
La seconde
planè
te é
tait
habité
e par un vaniteux
:
《
Ah! Ah! Voilà la visite
d’un admir
ateur!
》
s’écria de loin le vaniteux dès qu’il aper?ut le
petit prince.
Car,pour les vaniteux,les autres hommes
sont des admirateurs.
《
Bonjour,dit le petit
prince.V
ous avez un dr?
le de
chapeau.
-
C’est
pour
saluer,lui
répondit
le
vaniteux.
C’est
pour
sal
uer
quand
on
m’reusement il ne passe jamais personne
par ici.
- Ah oui
?
dit le
petit prince qui ne comprit pas.
-
Frappe tes
mains l’une contre
l’autre
》
,conseilla donc le
vaniteux.
Le
petit
prince
frappa
ses
mains
l’une
contre
l’
vaniteux
salua
modestement
en
soulevant son chapeau.
《
?a,c’est
plus
amusant
que
la
visite
au
roi
》
,se
dit
en
lui-
mê
me
le
petit
prince.
Et
il
recommen?a
de
frapper
ses
mains
l’une
contre
l’
vaniteux
recommen?a
de
saluer
en
soulevant son chapeau.
Après cinq minutes
d’exercice le petit prince se fatigua de la
monotonie du jeu
:
《
Et,pour que le
chapeau tombe,demanda-t-il,que faut-il
faire
?》
Mais le vaniteux ne
l’entendit vaniteux n’entendent jamais que les
louanges.
《
Est-
ce que tu
m’ad
miers vraiment
beaucoup
?
demanda-t-il au
petit prince.
-
Qu’est
-
ce que
signifie“admirer”
?
-
“Admirer”signifie reconna?tre que je
suis l’homme le plus beau,le mieux habillé, le
plus riche
et le plus intelligent de la
planè
te.
- Mais tu es seul sur ta
planè
te!
- Fais-moi ce -moi quand
mê
me!
-
Je
t’admire,dit
le
petit
prince,en
haussant
un
peu
les
épaules,mais
en
quoi
cela
peut
-il
bien
t’intéresser
?》
Et le petit
prince s’en fut.
《
Les
grandes
personnes
sont
dé
cidé
ment
bien
bizarres
》
,se
dit-il
simplement
en
lui-mê
me
durant son voyage.
11
La
planè
te suivante é
tait
habité
e par un visite fut
trè
s courte mais elle plongea le
petit prince dans une grande
mé
lancolie :
《
Que
fais-tu
là
?
dit-
il
au
buveur,qu’il
trouva
installé
en
silence
devant
une
collection
de
bouteilles vides et une collection de
bouteilles pleines.
-
Je bois,répondit le
buveur,d’un air lugubre.
- Pourquoi bois-
tu
?
lui demanda le petit
prince.
- Pour
oublier,ré
pondit le buveur.
- Pour oublier
quoi
?
s’enqui
t le
petit prince qui dé
jà
le
plaignait.
-
Pour oublier que j’ai honte,avoua le
buveur en baissant la tête.
- Honte de
quoi
?
s’informa le petit
prince qui désirait le secourir.
- Honte de
boire
》
!acheva le buveur qui
s’enferma définitivement dans le
si
lence.
Et le petit prince s’en
fut,perplexe.
《
Les grandes personnes sont
dé
cidé
ment trè
s
trè
s bizarres
》
,se
disait-il en lui-mê
me durant le
voyage.
12
La quatrième planète était
celle du homme était si occupé qu’il ne leva même
pas la
tête à l’arrivée du
petit prince.
《
Bonjour,lui dit celui-
ci.V
otre cigarette est
é
teinte.
-
Trois
et
deux
font
cinq.
Cinq
et
sept
douze.
Douze
et
trois
r.
Quinze
et
sept
-deux
et
six
vingt-
huit.
Pas
le
temps
de
la
rallumer.
Vingt-six
et
cinq
trente
et
! ?a fait donc cinq cent
un millions six cent vingt-deux mille sept cent
trente et un.
-
Cinq cent millions de quoi
?
-
Hein
?
Tu
es
toujours
là
?
Cinq
cent
un
millions
de...je
ne
sais
plus...j’ai
tellement
de
travail!Je
su
is sérieux,moi,je ne m’amuse pas à
des balivernes!Deux et cinq sept...
- Cinq cent un
millions de quoi
?》
répéta le
petit prince qui jamais de sa vie n’avait renoncé
à
une question,une fois qu’il avait
posée.
Le businessman leva la tê
te
:
《
Depuis
cinquante-
quatre ans que j’habite cette
planète
-
ci,je n’ai été
dérangé que trois
première
fois
?’a
été,il
y
a
vingt
-
deux
ans,par
un
hanneton
qui
était
tombé
dieu
sait
d’où
.Il
répandait
un
bruit
épouvantable,et
j’ai
fait
quatre
erreurs
dans
une
seconde
fois
?’a
été,il
y
a
onze
ans,par
une
crise
de
manque
d’
n’ai
pas
le
temps
de
fl?
suis sé
rieux,
troisiè
me fois...la voici!Je disais
donc cinq cent un millions...
- Millions de
quoi
?》
Le businessman comprit
qu’il n’était point d’espoir de paix
:
《
Millions de ces petites
choses que l’on voit quelquefois dans le
ciel.
- Des mouches
?
- Mais non,des
petites choses qui brillent.
- Des
abeilles
?
- Mais petites choses
doré
es qui font rê
vasser les
fainé
je suis sé
rieux,moi!Je
n’ai pas le temps de
rêvasser.
- Ah!des
é
toiles
?
-
C’est bien ? étoiles.
- Et que
fais-
tu de cinq cents millions
d’étoiles
?
- Cinq cent un millions six
cent vingt-deux mille sept cent trente et suis
ré
rieux,moi,je suis
pré
cis.
- Et que fais-tu de ces
é
toiles
?
-
Ce
que j’en fais
?
- Oui.
- les possè
de.
- Tu
possè
des les
é
toiles
?
- Oui.
-
Mais j’ai déjà vu un roi
qui...
- Les rois ne possè
dent
“
rè
gnent
”s
ur.C’est très différent.
- Et à
quoi cela
te sert-il de possé
der les
é
toiles
?
- ?a me sert
à
ê
tre riche.
- Et à
quoi cela
te sert-
il d’être
riche
?
-
? acheter
d’autres étoiles,si quelqu’un en
trouve.
》
《
Celui-
là
,se dit en lui-mê
me le
petit prince, il raisonne un peu comme mon
ivrogne.
》
Cependant il posa encore
des questions :
Comment peut-on possé
der les
é
toiles
?
- ? qui sont-
elle
?
riposta,grincheux,le
businessman.
-
Je ne sais pas.? personne.
-
Alors elles sont à moi,car
j’y ai pen
sé
le premier.
- ?a
suffit
?
-
Bien s? tu
trouves un diamant qui n’est à personne,il est à
tu trouves une ?le
qui n’est à
personne,elle est à tu as une idée le premier, tu
la fais breveter
:elle est à
moi je possè
de les
étoiles,puisque jamais personne avant
moi n’a songé à les posséder.
-
?a
c’est vrai,dit le petit qu’en
fais
-tu
?
-
Je
les gè les compte et je les recompte,dit le
businessman.C’est difficile. Mais je suis un
homme
sé
rieux!
》
Le petit
pri
nce n’était pas satisfait
encore.
《
Moi,si
je
possède
un
foulard,je
puis
le
mettre
autour
de
mon
cou
et
l’emporter.
Moi,si
je
possède
une fleur,je puis cueillir ma fleur et l’ tu ne
peux pas cueillir les étoiles!
- Non,mais je
puis les placer en banque.
-
Qu’est
-ce que
?
a veut dire
?
-
?a
veut dire que j’écris sur un petit papier le
nombre de mes é puis j’enferme à clef ce
papier-là
dans un tiroir.
-
Et
c’est tout
?
- ?a
suffit!
》
《
C’est amusant
pensa le petit prince.C’est assez poé ce n’est pas
très sérieux.
》
Le
petit
prince
avait
sur
les
choses
sé
rieuses
des
idé
es
trè
s
diffé
rentes
des
idé
es
des
grandes
personnes.
《
Moi,dit-
il
encore,je possède une fleur que j’arrose tout les
possède trois volcans que
je
ramone toutes les je ramone aussi
celui qui est é ne sait jamais.C’est utile
à mes volcans,et c’est utile à ma
fleur,que je les possè tu n’es pas util aux
étoiles...
》
Le businessman ouvrit la
bouche mais ne trouva rien à
ré
po
ndre,et le petit prince
s’en fut.
《
Les grandes personnes sont
dé
cidé
ment tout à
fait extraodinaires
》
,se
disait-il simplement en
lui-
mê
me durant le voyage.
13
La cinquième
planète était très curieuse.C’était la plus petite
de y avait là juste
assez de
place
pour
loger
un
ré
verbè
re
et
un
allumeur
de
ré
verbè
res.
Le
petit
prince
ne
parvenait
pas
à
s’expliquer
à
quoi
pouvaient
servir,quelque
part
dans
le
ciel,sur
une
planète
sans
maison
ni
population,un
ré
verbè
re et un allumeur de
ré
verbè
ant il se dit en lui-
mê
me :
《
Peut-ê
tre bien
que cet homme est ant il est moins absurde que le
roi,que le
vaniteux,que le businessman
et que le moins son travail a-t-il un il allume
son
réverbère,c’est
comme
s’il
faisait
na?tre
une
étoile
de
plus,ou
une
il
é
teint
son
réverbère,?a
endort
la
fleur
ou
l’étiole.
C’est
une
occupation
très
jolie.C’est
véritablement
utile
puisque c’est
joli.
》
Lorsqu’il aborda la
planète,il salua respectueusement
l’allumeur
:
《
oi viens-
tu
d’étein
dre ton ré
verbè
re
?
-
C’est la
consigne,répondit l’r.
-
Qu’est
-ce que la
consigne
?
-
C’est
d’éteindre mon réverbèr.
》
Et il le
ralluma.
《
Mais pourquoi viens-tu de
le rallumer
?
-
C’est la
consigne,répondit l’
allumeur.
-
-
-
-
-
-
-
-
-
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